– 80% de la population française a un profil sur les réseaux sociaux ?
– 60% des acheteurs « googlelisent » les produits avant d’acheter ?
– 34% des acheteurs tapent le nom d’une société/marque sur Facebook ?
N’attendez pas que ces chiffres atteignent les 100% pour vous faire une place sur les réseaux sociaux.
C’est par cet argumentaire choc qu’une société française démarche actuellement les entreprises en leur proposant de booster leur présence dans les réseaux sociaux pour booster leurs ventes.
De fait, le constat s’impose à tous : L’économie digitale et le commerce par les réseaux sociaux – le Web-to-store et pour simplifier le F-commerce (pour Facebook commerce) – font parler.
Coca Cola a 41 millions de fans, Starbucks 30, Converse 30…
Dans le même temps, les taux d’engagement (interactions avec la marque) ne dépassent pas 0,1%…
Alors qu’en penser ?
Dans ce contexte, le questionnement des Directions marketing est souvent exposé comme suit : « Que nous rapporte notre présence dans les réseaux sociaux ? Passons-nous à côté de la martingale à 7 chiffres ? ».
En tant que consultant, ce questionnement interpelle.
Est-ce le bon questionnement ?
Est-ce la meilleure approche que de construire sa présence dans les réseaux sociaux par une approche de retour sur investissement ? – et l’on ressent bien l’objectif sous-jacent voire explicitement posé de retour à court terme.
Est-ce finalement la bonne approche de parler de « F-commerce » ?
Par comparaison, quel est le retour sur investissement d’une campagne de pub à la TV à une heure de grande écoute ?
Difficile à mesurer précisément et pourtant la question ne se pose pas pour un Directeur de marques de Produits de Grande Consommation.
Imaginez-vous Procter & Gamble retirer ses produits de l’access prime-time ?
Pour rester dans le champ des comparaisons, P&G a-t-elle imaginé un jour payer pour avoir des leads commerciaux provenant de ses campagnes dans les mass-media ?
Et bien, il est intéressant de relever que le même P&G a mis fin récemment à un contrat visant à acheter des leads commerciaux provenant de « Facebookables ». Intéressant à double titre : i) ce que l’on n’imagine pas demander à un media traditionnel, on l’exige de Facebook ; ii) c’est une belle preuve par l’exemple des limites d’une approche orientée « F-commerce » et retour sur investissement à court terme.
« Que nous rapporte notre présence dans les réseaux sociaux ? Passons-nous à côté de la martingale à 6 chiffres ? ».
Ce questionnement est centré sur Facebook (FB) et sur l’entreprise dans FB. Par extension, nous pourrions parler de raisonnement ego-centré.
Et si l’on inversait le questionnement ?
Centré sur les clients (et les prospects), le questionnement prend alors une toute autre perspective : « Comment répondre aux nouveaux usages des consommateurs ? Comment les capter là où ils se trouvent aux différents moments de leurs parcours avec leurs marques ? Comment leur proposer des expériences digitales qui répondent à leurs attentes ? Comment repenser le ‘mortar’ et mettre le réseau physique (agences, boutiques…) au cœur de l’expérience client ? ».
Même si les retours d’expérience ne sont pas suffisamment matures pour tirer des réponses définitives à ce nouveau questionnement – encore moins des martingales – il est possible d’esquisser des pistes de réflexion :
– Il est important de créer de l’épaisseur et du contenu à valeur ajoutée autour de la présence dans FB.
– Aujourd’hui, ce qui marche – ce qui répond aux attentes des « fans » FB –, consiste à créer une couche de « social game ». Au-delà de jeux concours, il s’agit de concevoir une « gamefication » plus évoluée et créative. A l’image d’une chasse au trésor créée par Scanbucks par exemple.
– En parallèle, il est important de créer de l’expérience digitale – faire vivre aux fans des expériences avec la marque dans FB : maquillage entre copines, conseil entre familles, participation à la conception d’un produit, invitation à des ventes privées, expériences virtuelles (de type second life)…
– Pour illustrer des pistes d’idée novatrices plus que pour souligner des bonnes pratiques de création d’expérience digitale, des « social apps » comme « fab » (http://fab.com/sale), « faschiolista »(http://www.fashiolista.com), « pose » (http://pose.com/feed#posed_and_loved) sont de bons candidats au benchmark.
– Dans le sens inverse – ou comment valoriser le « mortar », attirer les consommateurs dans le réseau de vente et générer à partir de celui-ci du flux et du bouche à oreille dans les réseaux sociaux pour finalement démultiplier et créer une boucle vertueuse – le concept de WePeek, jeune entreprise innovante française (www.wepeek.fr), est intéressant.
Pour autant que ces pistes de réflexion soient pertinentes, fonctionnent pour certaines ou soient encore au stade des promesses pour beaucoup, avant toute chose il convient d’avoir à l’esprit quelques facteurs clés d’échec :
– Ne pas avoir de STRATEGIE. Parlons de stratégie digitale pour être parfaitement à la page, même si nous lui préférons le terme de stratégie multicanal.
– Sous-estimer l’investissement (en ressources et en temps) dans l’infrastructure informatique et le SYSTEME D’INFORMATION. Il doit être la colonne vertébrale entre le front-office (sites internet harmonisés, versions adaptées pour les smartphones) ou le back office (source unique et base de données homogène pour les contenus, base de données client unifiée).
– Considérer la présence dans FB comme un objet « stand alone ». Ne pas mettre en place une ORGANISATION transversale et orientée client. C’est un projet CRM ! (l’on parle de « social CRM »).
Qu’est-ce qui est au cœur du concept de WePeek ? Le consommateur sur le lieu de vente.
Qu’est-ce qui intéresse un Directeur marketing, un Directeur de marque, un Directeur de Réseau, et plus largement une entreprise commerciale, si ce n’est d’optimiser les occasions de vente sur les lieux de vente (quels qu’il soient) ?
Et si une stratégie digitale, mise en perspective dans le cadre d’une stratégie d’entreprise, prenait sa source dans le consommateur et le réseau physique ?
Pour conclure, le « F-commerce » bouscule également les métiers du conseil.
Avant, pour concevoir et mettre en œuvre une stratégie CRM, les entreprises faisaient appel à des cabinets de conseil en stratégie et organisation (spécialisés ou généralistes). Pour concevoir et mettre en œuvre une stratégie de communication, elles faisaient appel à une agence de communication.
A l’avenir, pour concevoir et mettre en œuvre une (vraie) stratégie digitale, l’alliance des deux métiers semble incontournable. Les consultants n’ont pas leur pareil pour mettre en adéquation la stratégie et les moyens. Les agences de communication sont incontournables pour créer le contenu innovant et à valeur ajoutée.
Certaines entreprises ont mis en place une « stratégie » digitale à travers une solution (au sens de l’outil). Demandez leur retour d’expérience à celles qui il y a 15 ans ont mis en place une « stratégie » CRM après avoir reçu Monsieur Siebel !
Le F-commerce, ce n’est pas « the winner takes it all » mais à coup sûr les gagnants de demain auront construit leur stratégie digitale, au cœur de leur stratégie multi-canal, aujourd’hui.
Ici aussi, le changement c’est maintenant !